Il y a belle lurette que sa chambre n'avait plus connu une telle sérénité. Les tiroirs de son armoire en indigestion chronique ne régurgitent plus t-shirts et chaussettes dépareillées. Ses livres, suicidés réguliers des étagères, ne gisent plus sur la moquette maculée de traces de maquillage. Jusqu'à son lit, étrangement tiré à quatre épingles, qui trône un peu irréel au coeur de la pièce silencieuse.
Elle a pris son envol ce matin pour mettre un océan entre nous et je me découvre soudain mère agitée. Ce fichu cordon que je croyais coupé depuis longtemps se tend à force que je la sens s'éloigner. Il me déchire les entrailles jusqu'à me faire oublier les prises de bec et de tête à répétition qui ont empoisonné ces dernières années d'adolescence.
Elle a fini par la décrocher sa place tant convoitée. Boston, une autre langue, une autre famille, une autre vie pendant un an. C'est son choix. Elle a pris sa vie en main, s'est démenée pour concrétiser ses projets et marche sur le chemin qu’elle s’est tracée toute seule.
A l’heure d’internet, de skype et j’en passe, on refuse de croire que l’on peut être séparé mais là, dans nos tripes, on sent l’absence, la distance comme mesure de l’attachement… Il faut s’éloigner pour apprécier ce que l’on a et ceux que l’on aime. Ces derniers temps, l’imminence de son départ nous a rendues l’une et l’autre plus conciliantes. En silence, j’ai savouré ses bisous soudainement retrouvés le soir avant le coucher, les mots d’affection semés l’air de rien sur mon portable, notre connivence dans les préparatifs...
La nuit dernière, une violente tempête a dévasté son crâne et ce matin, mon coeur s'est soulevé sous l’effet d’une lame de fond dont jamais je n’aurais soupçonné l’apparition. Mais les turbulences de notre météo corporelle n'y ont rien changé. Elle s'en est allée. Reste ma fierté devant sa force, son courage, parce qu’il en faut pour partir seule vers l’inconnu. Un an pour découvrir, apprendre, comprendre, un an pour forger sa personnalité et se rendre compte de son appartenance culturelle, quelle richesse!
Et grâce à elle, j’aurai enfin un bon prétexte pour célébrer mon baptême américain. Un jour, pas tout de suite…
Good luck, Honey!
Très émouvant ... tellement fort en même temps.
RépondreSupprimerMe sentant très proche de cette situation, je la comprends parfaitement et redoute ... ce passage obligé de la vie.
Elle serait partie dans la ville d'à côté et le déchirement serait le même.
RépondreSupprimerL'envie de voler de ses propres ailes, de se découvrir hors des sentiers tracés par notre mère, voilà la force du début de l'âge adulte.
Précieuses sont les minutes échangées avec douceur, précieux seront vos échanges cybernétiques.
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Ton texte m'a touché et le sourire paisible de ta fille aussi.
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Dans l'écriture, on sent quand la garde est baissée, quand elle est vraie et sincère...
RépondreSupprimerPlus tes photos qui mettent en image ce chemin, dans la blondeur du blé...
J'aime tes bilelts, tu le sais bien. Mais celui-là a une saveur, une touche particulière. Se laisser aller à dire par écrit, un jour avec la parole. Grandir, quoi ! Pas vieillir..
Superbe texte! Tu exprimes à merveille le sentiment que tu éprouve. Les images sont en adéquation avec le texte.
RépondreSupprimerUne très belle note, des images qui parlent, des mots qui touchent, l'émotion partout. Superbe.
RépondreSupprimerEt good luck à elle, oui. :)
Je ne sais pas si la jolie demoiselle a lu ce billet, mais il raconte de maniere superbe l'amour maternel... Tes billets sont des pépites.
RépondreSupprimerquel texte émouvant et qui prend aux trippes!! elle a drôlement de la chance de t'avoir comme mamamn !!
RépondreSupprimerbisous
@Marie:on peut se préparer tant que l'on veut au départ d'un enfant, le moment venu l'émotion reste quand même très vive!
RépondreSupprimer@Laluna:le départ dans une ville voisine me semble quand même plus facile à gérer, des visites restent possibles. Mais effectivement, je me réjouis des échanges différents que nous aurons tout au long de cette année.
@Sarah: Merci pour ton beau compliment. Ecrire pour grandir, exorciser ses doutes, peurs et peines mais surtout pas pour vieillir, oui. De toute façon les enfants nous obligent d'une certaine manière à rester dans le coup.
@VincentP: effectivement, je m'efforce vraiment d'associer le verbe à l'image. Parfois, comme pour ce billet, tout s'enchaîne naturellement, parfois c'est beaucoup plus laborieux!
@Pastelle: hier fut effectivement une journée sous haute tension, heureusement qu'aujourd'hui est un autre jour. Merci pour elle!
@Bavardise: elle l'a lu cette nuit à son arrivée à New-York!
@La Souris teigneuse: oh la la, elle n'a pas toujours pensé cela ;-)
La même chevelure que sa mère on dirai ;o)
RépondreSupprimerElle va vivre un belle expérience et je suis sûre que ça va filer très vite !
En tout cas je lui souhaite de s'éclater, les séjours linguistiques nous font grandire à vive allure !
Quel beau message d'amour. Tes mots, toujours si prenants m'ont sincèrement émue.
RépondreSupprimerTa fille a l'air de savoir ce qu'elle se veut et c'est un grand plus pour se lancer dans la vie! Bonne chance à elle et plein de courage pour toi, pour affronter cette absence douloureuse. Le temps s'écoule si vite qu'elle sera revenue avant même que vos querelles te manquent!
Bises
Bon, et bien je ne suis pas originale si je dis qu'une fois de plus tes textes sont un vrai plaisir à lire !
RépondreSupprimerChapeau l'artiste !
Je souhaite moi aussi à ta "toute petite" une merveilleuse expérience !
Ô combien je connais les sentiments que tu resens actuellement. Je les ai connus également il n'y a pas si longtemps. En te lisant, ils sont remontés à la surface et j'ai bien cru les revivre.
RépondreSupprimerJ'espère que tout se passera bien pour ta fille ce qui a été le cas pour la mienne, après quelques péripéties, au terme de 11 mois passés en Californie.
Si tu en as envie un jour, comme on ne vit pas si loin l'une de l'autre, on pourrait en parler autour d'un café ?
Et n'oublie pas, la confiance est la clé de réussite dans cette aventure qui va la faire grandir et s'affirmer plus vite que tu ne le voudrais.
Bien à toi
verO
@Lululike: ma fille est une vraie blonde et moi une vraie frisée, la ressemblance s'arrête là;-) Elle s'éclatera quand elle aura surmonté son blues...
RépondreSupprimer@Camille: elle est effectivement déterminée et a une "sacrée tronche", ça l'aidera effectivement beaucoup.
@Laurence: contente de te savoir de nouveau sur la blogo!
@VerO: je bavarderai très volontiers avec toi de votre expérience. Je t'envoie un mail.
Un très joli texte ! L'ensemble est plein de sensibilité. J'aime beaucoup.
RépondreSupprimerC'est si joliment exprimé !
RépondreSupprimerRhaaa Boston .... La Nouvelle Angleterre, les USA... Je lui souhaite une merveilleuse année :)
C'est émouvant et beau. Tu arrives si bien à poser des mots sur des sentiments si forts. Mon Emma a voulu tenter l'expérience mais n'a pas eu le courage d'aller au bout, ta fille est courageuse, vos retrouvailles n'en seront sans doute que plus fortes.
RépondreSupprimerQuelle belle aventure elle entreprend ! Bonne chance à elle et bravo à toi de l'avoir accompagnée dans son choix.
RépondreSupprimerTrès jolie photo d'elle.
RépondreSupprimerQui mieux qu'une mère peut comprendre tout ce que tu ressens à cet instant précis.
On n'aime pas être séparé d'eux, mais ainsi va la vie.
Mais c'est un passage obligé pour tous parents.....malheureusement, on aimerait la garder près de soi tout le temps.
Elle l'en reviendra grandit de cette expérience.
On croise les doigts pour elle.